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Alain Morvan : Sauvons notre collège !

mardi 24 mai 2016, par oleg

Alain Morvan est un ancien Recteur d’Académie. Engagé depuis de longs mois dans sa lutte contre la réforme du collège, il vient de signer un article où se mêlent espoir et lucidité. Publié sur plusieurs sites, ce texte mérite d’être diffusé en intégralité sur le nôtre :

Cela fait une bonne année que la majorité des professeurs et des intellectuels alertent l’opinion quant aux dangers de la réforme du collège élaborée par Madame Najat Vallaud-Belkacem. Cette réforme, dont on ne rappellera jamais assez qu’elle a été imposée par un simple décret, n’est pas seulement, dans la forme, un déni de démocratie : elle est d’une incalculable nocivité pédagogique. Il ne serait guère honnête de le nier.

On a voulu faire croire qu’en marginalisant les matières réputées difficiles et en éradiquant les structures créatrices de succès (comme les classes bilangues ou les sections européennes), on rendrait le collège plus équitable. Comment ne pas voir, au contraire, qu’en permettant aux bons élèves de devenir encore meilleurs, non seulement on n’enlevait rien à ceux qui sont en difficulté, mais qu’on leur donnait, à eux aussi, l’envie d’apprendre et de se dépasser ? Les arguments contre l’indigence prétendument égalisatrice de ce « nouveau » collège sont légion. J’ai passé les douze derniers mois à les expliquer et n’entends pas les détailler de nouveau aujourd’hui. Un exemple suffira : en appauvrissant les contenus culturels que transmettait le collège, on ne fera que donner un avantage supplémentaire aux enfants issus des milieux aisés. Pour les élèves socialement favorisés, la conversation autour de la table familiale, l’accès à la bibliothèque des parents, les sorties au théâtre, au concert ou au musée, pallieront les carences du collège « repensé » par les soins diligents de la ministre et de Madame Florence Robine, la très dogmatique et autoritaire directrice générale de l’enseignement scolaire. Ainsi se perpétueront, en s’accentuant comme jamais, les avantages de ceux que Bourdieu appelait les « héritiers ». Politique de Gribouille, qui va à l’encontre du but recherché ! Et que dire de ce socle commun, dont on a dénaturé la mission, puisque, de plancher, on le transforme en plafond à ne dépasser sous aucun prétexte ?

​Malheureux professeurs, que l’on déposséderait de leur rôle naturel de passeurs de savoirs ! Malheureux élèves, que l’on transformerait à leur insu en cobayes d’une idéologie dévastatrice ! Malheureux pays, qui se glorifierait d’avoir extirpé la culture, la réflexion, le goût de l’effort et la reconnaissance du mérite !

​Heureusement, il est temps encore : la mise en place effective de cette désastreuse réforme à la rentrée 2016 est profondément compromise, comme l’atteste le fiasco des séquences de formation destinées aux enseignants. La ministre, peut-être déjà désavouée, perd ses nerfs, refuse de recevoir les personnels concernés, répond aux arguments les plus raisonnables par des invectives et des contre-vérités peu dignes de la fonction qu’elle exerce. Le pouvoir hésite. L’espoir est en train de changer de camp. Le soutien massif des parents d’élèves aux demandes d’abrogation montant de toutes parts sera déterminant. C’est dans cet esprit que je me félicite des initiatives prises par « Ambitions FCPE » et que je les soutiens.

​Vive le collège !

​Vive le service public de l’Éducation nationale !

​Vive la République !


​​​​​​Alain MORVAN

​​​​​​Ancien recteur des académies de

​​​​​​Clermont-Ferrand, Amiens et Lyon,

Professeur émérite à l’université de la Sorbonne nouvelle (Paris 3)

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