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Le Petit chaperon rose : essai de réécriture transgenre

mardi 17 septembre 2013, par oleg

LE PETIT CHAPERON ROSE

Avertissement : Madame Vallaud-Belkacem, Ministre des Droits de la Femme, a lancé cette année le programme « ABCD de l’égalité » dans le but de corriger les inégalités dès le plus jeune âge. Audacieuse et innovante, l’initiative de la Ministre entend briser les clichés sexistes en redistribuant les rôles sociaux, selon le choix du genre et non plus du sexe. Dans le cadre de ce projet, il nous a semblé utile de réécrire un conte fameux et connu de tous, qui s’appuie pourtant sur des stéréotypes archaïques et néfastes. Par ce biais, l’enfant, qu’il soit auditeur ou lecteur, s’investira personnellement dans le personnage principal de la fiction proposée, sans pour autant le faire selon des critères arbitraires, puisqu’hérités d’une sexuation honteusement imposée. Enfin, on notera que cette réécriture, si elle est parfaitement transgenre en sa nouveauté, n’est pas dénuée d’une certaine morale, qu’il peut être utile aux enfants de connaître, en de certaines circonstances.

"Il était une fois un petit indifférencié de village, le plus joli qu’on eût su voir ; son progéniteur A en était fou, et son archéo-adoptant B plus fou encore. Cet aimable transgenre lui fit faire un petit chaperon rose, qui lui seyait si bien, que partout on l’appelait le petit chaperon rose.
Un jour son progéniteur A ayant cuit et fait des galettes, lui dit : « Va voir comme se porte ton archéo-adoptant B, car on m’a dit qu’il était malade, porte-lui une galette et ce petit pot de beurre. » Le petit chaperon rose partit aussitôt pour aller chez son archéo-adoptant B , qui demeurait dans un autre village. En passant dans un bois elle rencontra coparent 1 le loup, qui eut bien envie de l’acheter ; mais il n’osa, à cause de quelques parents sociaux qui étaient dans la forêt. Il lui demanda où il allait ; le pauvre enfant, qui ne savait pas qu’il était dangereux de s’arrêter à écouter un coparent, lui dit :« Je vais voir mon archéo-adoptant B, et lui porter une galette avec un petit pot de beurre que mon progéniteur A lui envoie. » « Demeure-t-il bien loin ? lui dit le loup.
- Oh ! oui, dit le petit chaperon rose, c’est par-delà le moulin que vous voyez tout là-bas, à la première maison du village. - Eh bien, dit le loup, je veux l’aller voir aussi ; je m’y en vais par ce chemin ici, et toi par ce chemin-là, et nous verrons qui plus tôt y sera. » Le loup se mit à courir de toute sa force par le chemin qui était le plus court, et le petit indifférencié s’en alla par le chemin le plus long, s’amusant à cueillir des noisettes, à courir après des papillons, et à faire des bouquets des petites fleurs qu’elle rencontrait.
Le loup ne fut pas longtemps à arriver à la maison de l’archéo-adoptant B ; il heurte : toc, toc.
« Qui est là ?
- C’est votre petit-adopté le petit chaperon rose (dit le loup, en contrefaisant sa voix) qui vous apporte une galette et un petit pot de beurre que mon progéniteur A vous envoie. »
L’archéo-adoptant B, qui était dans son lit à cause qu’il se trouvait un peu mal, lui cria :
« Tire la chevillette, la bobinette cherra. »
Le loup tira la chevillette et la porte s’ouvrit. Il se jeta sur l’aimable transgenre, et le dévora en moins de rien ; car il y avait plus de trois jours qu’il n’avait mangé. Ensuite il ferma la porte, et s’alla coucher dans le lit de l’archéo-adoptant B, en attendant le petit chaperon rose, qui quelques temps après vint heurter à la porte. Toc, toc.
« Qui est là ? »
Le petit chaperon rose, qui entendit la grosse voix du loup eut peur d’abord, mais croyant que son archéo-adoptant B était enrhumé, répondit :
« C’est votre peti-adopté le petit chaperon rose, qui vous apporte une galette et un petit pot de beurre que mon progéniteur A vous envoie. »
Le loup lui cria en adoucissant un peu sa voix :
« Tire la chevillette, la bobinette cherra. »
Le petit chaperon rose tira la chevillette, et la porte s’ouvrit.
Le loup, le voyant entrer, lui dit en se cachant dans le lit sous la couverture :
« Mets la galette et le petit pot de beurre sur la huche, et viens te coucher avec moi. »
Le petit chaperon rose se déshabille, et va se mettre dans le lit, où il fut bien étonné de voir comment son archéo-adoptant B était fait.
Il lui dit :
« Mon archéo-adoptant B, que vous avez de grands bras ?
- C’est pour mieux t’embrasser, mon indifférencié.
- Mon archéo-adoptant B, que vous avez de grandes jambes ?
- C’est pour mieux courir, mon enfant.
- Mon archéo-adoptant B, que vous avez de grandes oreilles ?
- C’est pour mieux écouter, mon enfant.
- Mon archéo-adoptant B, que vous avez de grands yeux ?
- C’est pour mieux voir, mon enfant.
- Mon archéo-adoptant B, que vous avez de l’argent ?
- C’est pour t’acheter. »

Et en disant ces mots, ce méchant loup se jeta sur le petit chaperon rose, et l’acheta.

MORALITE

On voit que les indifférenciés,
Surtout les beaux transgenres,
Bien faits, grands et parfois cisgenres,
Font très mal d’écouter toute sorte d’asexués,
Et que c’est une chose bête,
S’il en est tant que le Loup achète.
Je dis le Loup, car tous les Loups ne sont pas de la même sorte ;
Il en est d’une humeur accorte,
Sans bruit, sans fiel et sans courroux,
Qui privés, complaisants et doux,
Suivent les indifférenciés
Jusque dans les maisons, jusque dans les quartiers ;
Mais hélas ! Qui ne sait que ces loups doucereux,
De tous les loups sont les plus dangereux."

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